mercredi 3 octobre 2018

Syméon Claudex était pris d'un sérieux doute.

Au commencement était la roche. Puis vint le vent. Et il vit que c'était bon. Et il vit que ce monde minéral était plaisant à son âme. Il eût pu l'habiter seul. Il l'eût habité à mesure qu'il le créait. Il l'eût créé à mesure qu'il l'habitait. Et cela eût été bon. Et cela eût été plaisant à son âme. Mais la tentation du succès lui fut envoyée (sous les traits d'un ami, qui plus est – avec qui il faudrait rompre, pensait-il). Il succomba à la tentation de corrompre la beauté minérale de son roman en y faisant naître la vie. Mais l'Ange de la Littérature veillait, et il anéantit cette prolifération nuisible. Il eût fallu s'en réjouir. Au lieu de cela, Syméon reproduisit dans son propre corps l'hécatombe qui s'était produite dans son roman. Toute vie intestinale avait été anéantie. C'était comme s'il faisait corps avec le roman. 

Comme si il était, lui, Syméon, le corps même du roman !

L’œuvre et son créateur ne faisaient-ils qu'un ?

Alors, maintenant que le roman ne contient plus qu'un peu de vent et des tonnes de cailloux, prendre ou pas rendez-vous chez l'urologue ?, se demandait Syméon. Ne manqueraient plus que des pierres aux reins !