Syméon Claudex
était pris d'un sérieux doute.
Au commencement
était la roche. Puis vint le vent. Et il vit que c'était bon. Et il
vit que ce monde minéral était plaisant à son âme. Il eût pu
l'habiter seul. Il l'eût habité à mesure qu'il le créait. Il
l'eût créé à mesure qu'il l'habitait. Et cela eût été bon. Et
cela eût été plaisant à son âme. Mais la tentation du succès
lui fut envoyée (sous les traits d'un ami, qui plus est – avec qui
il faudrait rompre, pensait-il). Il succomba à la tentation de
corrompre la beauté minérale de son roman en y faisant naître la
vie. Mais l'Ange de la Littérature veillait, et il anéantit cette
prolifération nuisible. Il eût fallu s'en réjouir. Au lieu de
cela, Syméon reproduisit dans son propre corps l'hécatombe qui
s'était produite dans son roman. Toute vie intestinale avait été
anéantie. C'était comme s'il faisait corps avec le roman.
Comme si il
était, lui, Syméon, le corps même du roman !
L’œuvre et son créateur ne
faisaient-ils qu'un ?
Alors, maintenant que le roman ne contient plus qu'un peu de vent et des tonnes de
cailloux, prendre ou pas rendez-vous chez l'urologue ?, se demandait Syméon. Ne manqueraient plus que des pierres aux reins !