vendredi 16 novembre 2018

Syméon Claudex s'est assoupi. À son réveil, il constate que toutes ses notes concernant son roman minéral ont été chiffonnées. Elles encombrent désormais la corbeille et jonchent le sol comme le feuillage caduc et chu d'un chêne en automne. La couverture de son encyclopédie Roches et Minéraux du Monde, éditions Delachaux & Niestlé, semble avoir été lacérée au cutter et les pages arrachées par dizaines finissent de se consumer dans l'âtre. Il jette un œil par la fenêtre qui donne sur le jardin. Les moulins à vent que ses enfants avaient plantés ont été brisés et les restes de leurs pales en plastique dépassent sous le couvercle de la benne à ordures. Syméon se rue devant un miroir : ce sont bien ses traits ; pourtant, un étrange éclat se reflète dans ses yeux. Sa vue semble brouillée et il y a plus mystérieux : ces griffures partout sur les boiseries du bureau. Et ces touffes de poil noir et gras, pareilles à des échantillons de fourrure de quelque bête sauvage, accrochées aux accoudoirs de son fauteuil...

C'est bizarre, pense Syméon Claudex, le chat est pourtant mort depuis des mois, qui du reste était blanc.

Sur le bureau, les chapitres 21, 22 et 23 du premier tome de "Les oliviers de la bastide des Templiers sous l'orage" ont été imprimés, sans que Syméon Claudex ait le moindre souvenir de les avoir écrits.