mercredi 29 août 2018

Ce matin, après une course matinale de mille cinq cents mètres, Syméon Claudex se sent dans une forme de prix Nobel. Il déroule, dit-il au téléphone à un ami qui prend de ses nouvelles. Cette fois c'est certain, à la fin de la journée, il aura terminé le premier chapitre. Il voit très exactement le point d'arrivée et la phrase qui sera l'apothéose de ce premier acte. Tout le jour Syméon écrit, sans lever la tête, dans un état de fièvre et d'intense concentration. Vers la fin de l'après-midi, il sent qu'il n'est plus qu'à deux ou trois phrases du but. Il est tel un marin apercevant l'entrée de la rade. Quand vient le moment d'écrire cette dernière phrase longtemps mûrie, Syméon réalise qu'elle ne veut strictement rien dire et ne fait aucunement suite à ce qu'il vient d'écrire pendant des heures. S'étant laissé entraîner par le flot impétueux de son écriture, le voici au point diamétralement opposé à celui qu'il voulait atteindre avec, sur les bras, une phrase morte avant même d'avoir été écrite.